jeudi 13 juin 2019

Livres lus (et recommandés)


De temps à autre, je reviens ici avec une liste de livres que j'ai lus récemment, et que j'ai appréciés. Livres de voyage, essais, romans.

"Sur la route du Danube", d'Emmanuel Ruben. Géographe de formation, grand voyageur érudit, l'auteur remonte tout le cours du Danube à vélo, avec un compagnon de route d'origine ukrainienne, du delta en Ukraine et en Roumanie jusqu'aux sources dans la Forêt Noire. Magnifique et engagé. 

Comme ils étaient cités dans son livre, j'ai enchaîné avec les superbes récits de voyage, surtout à pied, du Britannique Patrick Leigh Fermor. Celui-ci a écrit dans les années 80, sur la base de ses journaux de voyage rédigés 50 ans auparavant, alors qu'il était tout jeune (18-19 ans), un grand récit de sa traversée de l'Europe, de Rotterdam à Constantinople. En 1933 et 1934, il a donc parcouru l'Allemagne (où Hitler venait d'arriver au pouvoir - saisissante description d'un pays en mutation), l'Autriche et la Tchécoslovaquie : c'est le premier tome, "Le temps des offrandes". Puis il a traversé la Hongrie et la Roumanie, encore très rurales et traditionnelles en 1934 : c'est le deuxième tome, "Entre fleuve et forêt"

Sur l'Allemagne, sa mémoire, les accommodements de la majorité du peuple allemand avec le pouvoir nazi, j'ai lu "Les amnésiques", de Géraldine Schwarz. Franco-allemande, celle-ci s'est plongée dans le passé de sa famille paternelle, des commerçants en matériaux du Bade, qui ont profité de la revente forcée d'une entreprise appartenant à une famille juive. Les ambiguïtés, les petites compromissions sont admirablement décrites et remises en perspective avec l'histoire de l'Allemagne.

Quelques années après sa parution, j'ai enfin lu le récit d'ermitage de Sylvain Tesson dans une cabane au bord du lac Baïkal, "Dans les forêts de Sibérie". Rude, poétique et inspiré. L'auteur n'était pas si ermite que ça, puisqu'il a noué des relations chaleureuses et parfois épiques avec ses "voisins", souvent éloignés d'une demi-journée de marche.

Pour continuer en Sibérie, j'ai bien aimé le roman de Victor Rebizov, "Volia volnaïa" ("Liberté libre"), qui se déroule en Sibérie profonde, aux confins de la Iakoutie et de la mer d'Okhotsk, dans un monde de pêcheurs, de trafiquants d'oeufs de saumon, de policiers corrompus, de chasseurs. Par contre, j'ai peu aimé son dernier roman, "Devouchki", qui retrace les tribulations de deux jeunes Sibériennes à Moscou, et qui est plutôt du niveau d'un roman de gare.

Du côté des romans, toujours, mais à l'autre bout du monde, j'ai aimé deux romans d'Alain Mabanckou, "Quand j'aurai vingt ans" et "Les cigognes sont immortelles". Ces deux livres sont en fait largement autobiographiques. Le narrateur est Alain Mabanckou lui-même, enfant puis adolescent dans la ville de Pointe-Noire, au Congo-Brazzaville, dans les années 70 et 80, aux plus beaux jours du marxisme-léninisme tropical du président Marien Ngouabi et du Parti Congolais du Travail. Très savoureux.

Je lis tous les livres de l'écrivain égyptien Alaa El-Aswany avec plaisir et intérêt. Ce sont toujours des récits choraux enracinés dans la réalité politique et sociale de l'Egypte. Le dernier roman d'El-Aswany, "J'ai couru vers le Nil", décrit la montée et l'éclatement de la révolution de 2011, qui arrivera à renverser le régime de Moubarak. Hélas, comme dans d'autres pays arabes, la révolution a fait long feu et l'Egypte, sous le maréchal Al-Sissi, connaît sans doute aujourd'hui un régime encore plus répressif que celui de Moubarak.

Deux essais, pour terminer. D'abord, le diagnostic passionnant du politologue Jérôme Fourquet sur la France actuelle, sur les plans électoral, démographique, sociologique, "L'archipel français", truffé de tableaux, de graphiques et de cartes, plus parlants les uns que les autres. 

Ensuite, à l'heure de la mode de la "collapsologie", du "c'était mieux avant", et des peurs millénaristes, le brillant essai de Steven Pinker, "Le triomphe des lumières", remet les pendules à l'heure. 

10 commentaires:

  1. J'ai adoré le livre de Sylvain Tesson.
    Une plongée au coeur de l'humain. Et une belle vibration.
    Cet homme est exceptionnel.
    •.¸¸.•*`*•.¸¸🦋

    RépondreSupprimer
  2. Le film qui en a été tiré (avec la collaboration de Sylvain Tesson) est très beau aussi.

    De Tesson, j'ai bien aimé aussi "Sur les chemins noirs".

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai acheté « anagrammes à la folie » juste pour le titre...
      Belle soirée
      •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

      Supprimer
  3. Et le contenu est-il aussi bien que le titre ? ;o)

    RépondreSupprimer
  4. J'ai lu, il y a 2 mois, le livre de Ruben. Il est remarquable et complète bien celui de Magris qui oublie trop les Balkans et est trop universitaire. Ruben parle très bien de la Serbie notamment, un pays totalement oublié. On a envie de refaire son voyage à vélo. Il faut juste un peu de temps et de courage.

    Sylvain Tesson, je trouve qu'il alterne le bon et le moins bon. "Dans les forêts de Sibérie", ça parle d'un écolo-bobo français mais sûrement pas de la Russie. Je n'ai pas du tout aimé et ça m'a fait plutôt rigoler. De lui, j'ai plutôt aimé "Berezina" ou "L'axe du loup".

    "Devouchki", je l'ai acheté récemment. Roman de gare, sûrement mais probablement plus proche de la réalité russe que le livre de Tesson.

    Enfin, les livres de Fourquet et de Pinker remettent effectivement les choses à leur place.

    Bien à vous,

    Carmilla

    RépondreSupprimer
  5. J'ai essayé de lire "Danube" de Claudio Magris, mais je n'ai pas réussi à y entrer. J'ai lu quand même certains chapitres, il y a un certain temps déjà, mais j'ai trouvé cela souvent trop aride, trop historique.

    Je me souviens que vous n'aviez pas aimé le livre de Sylvain Tesson. Pour ma part, je l'ai vraiment apprécié. Je trouve que c'est une vraie expérience humaine, personnelle, sensorielle, que la nature brute sibérienne est rendue palpable, et que ses échanges avec les quelques habitants, isolés, des rives du Baïkal, sonnent juste.

    RépondreSupprimer
  6. La couverture de "Sur la route du Danube", d'Emmanuel Ruben donne envie de plonger dans le livre.
    un livre de voyage à lire, "L'usage du monde" de Nicolas Bouvier.

    RépondreSupprimer
  7. Un magnifique classique, "L'usage du monde"...

    RépondreSupprimer
  8. Merci pour cette moisson... j'ai lu pas mal de ces auteurs, Tesson, Mabanckou, El-Aswany, sauf le dernier que je vais commencer lorsque j'aurai 5 minutes ..
    Bonne lecture

    RépondreSupprimer
  9. Merci Pivrose. J'ai encore lu deux bons bouquins pendant ma dernière semaine aviothoise, "La mort du Khazar rouge" de Shlomo Sand et "Europolis" de Jean Bart (alias Eugeniu Botez, un écrivain roumain).

    RépondreSupprimer